Vidéo / Loi Travail : une intersyndicale veut la corriger, une autre demande son retrait

Vidéo / Loi Travail : une intersyndicale veut la corriger, une autre demande son retrait

03.03.2016

Représentants du personnel

L'opposition au projet de loi Travail se traduit désormais par deux intersyndicales. L'une (CFDT, CFTC, CGC, UNSA, etc.) appelle à une manifestation le samedi 12 mars pour faire pression sur le gouvernement afin qu'il corrige le texte. L'autre (CGT, FO, FSU, SUD, etc.) appelle à la grève pour le jeudi 31 mars pour obtenir le retrait du projet.

 

 

 

Hier matin au siège de l'UNSA à Bagnolet, près de Paris, dix organisations syndicales de salariés et d'étudiants ont poursuivi les travaux initiés le 23 février au siège de la CGT à Montreuil, qui avaient abouti à une déclaration commune. Après l'annonce du report au 24 mars de la présentation du projet de loi El Khomri en conseil des ministres, l'enjeu de cette matinée de travail était de parvenir à définir une ligne commune à défendre, séparément, la semaine prochaine lors de bilatérales avec Manuel Valls. Mais le front d'opposition syndicale s'est scindé en deux camps à la mi-journée, avec deux intersyndicales réclamant l'une des modifications au projet de loi et l'autre le retrait pur et simple du texte (*).

Les syndicats réformistes mobilisent pour le samedi 12 mars

Le premier texte, signé seulement par la CFDT, la CFE-CGC, la CFTC, l'UNSA et l'organisation étudiante FAGE, a été présenté hier vers 13h après plus de trois heures d'échanges à dix (voir notre vidéo). "Pour tardif qu'il soit, le moment de concertation décidé par le Premier ministre ne doit pas se limiter à un exercice creux, ni à un simulacre", prévient cette déclaration commune. "Sur le fond, nous demandons unanimement le retrait du barème d'indemnités aux prud'hommes, le maintien des mesures actuelles s'agissant des astreintes, du fractionnement des repos et du repos des apprentis mineurs, énumère Luc Bérille, secrétaire général de l'UNSA. Il y a aussi dans la déclaration commune à cinq une demande de réécriture complète du texte en matière de licenciement pour motif économique".

"Plus généralement, ce que l'on reproche au projet de loi c'est de tenter de chasser le juge comme arbitre entre le salarié et l'entreprise lorsqu'il y a un conflit, complète Franck Mikula, secrétaire national de la CFE-CGC. Nous voulons également renforcer le compte personnel d'activité (CPA), avec la création d'un compte-temps intégré au CPA". La déclaration a été complétée dans l'après midi par un appel à une manifestation le samedi 12 mars "dans toute la France". Ce choix s'explique : le samedi a sans doute été jugé plus propice au succès d'un rassemblement qu'une journée en semaine, d'autant qu'est prévu le lundi 14 mars avec le Premier ministre une réunion de concertation avec l'ensemble des partenaires sociaux, à l'issue de laquelle le gouvernement pourrait annoncer comment il compte amender son projet.  

Représentants du personnel

Les représentants du personnel sont des salariés élus ou désignés chargés de représenter les salariés de l’entreprise avec des missions spécifiques selon l’instance représentative du personnel (IRP) à laquelle ils appartiennent. Il y a quatre grandes IRP : les DP, le CE, CHSCT et les délégués syndicaux.  Au 1er janvier 2020, l’ensemble des IRP (hormis les délégués syndicaux) devront fusionner au sein du CSE.

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CGT,  FO, FSU et Sud appellent à la grève le jeudi 31 mars

Mais cette première déclaration intersyndicale et cette stratégie ont été jugées insuffisantes par FO, déjà non signataire de la première déclaration intersyndicale, mais aussi par la CGT, qui avait déjà soutenu les rassemblements organisés le 9 mars (date initiale prévue de présentation du texte en Conseil des ministres) contre le projet de loi. Un deuxième groupe de syndicats décidés à demander le retrait du texte s'est donc réuni au siège de la CGT dans la foulée de la première réunion à l'Unsa.

"Certaines organisations syndicales ont élaboré dès mercredi un projet de déclaration que l'on nous a présenté ce matin. Nous n'avons guère apprécié cette mise à l'écart, explique Michelle Biaggi, secrétaire confédérale FO. Force ouvrière maintient sa demande de retrait pur et simple du projet de loi, pour enfin se mettre autour d'une table et discuter vraiment avec le gouvernement. Nous avons le sentiment que le gouvernement veut réformer à marche forcée, or je vous assure que la cinquantaine d'article du texte déstructurent tout le code du travail : le droit des licenciements, les temps partiels, la négociation collective". Un point de vue que partage la CGT : "Il faut abandonner ce projet de réforme et ouvrir des négociations sur d'autres bases, soutient Fabrice Angéi, membre du bureau confédéral. Il faut donc peser significativement sur le gouvernement, et pour nous cela veut dire mobiliser, comme le 9 mars prochain avec d'autres organisations syndicales et les jeunes".

CGT et FO défendent la primauté de la loi, puis de la branche

C'est donc le sens de la déclaration de la deuxième intersyndicale, approuvée dans l'après midi par la CGT, FO, FSU, Solidaires, l'Unef, l'UNL et la Fidl. Ce texte critique, comme les autres syndicats dits réformistes, le barème et la partie sur les licenciements économiques, mais il rejette aussi la nouvelle architecture du droit du travail qu'il représente, avec notamment le renforcement de la négociation collective d'entreprise. Parce que le projet de loi travail "prévoit des procédures et des décisions qui placent les salariés sous la menace et le chantage à l'emploi", parce qu'il "vise à remettre en cause l'égalité de droit et de traitement en abandonnant le niveau national de négociation et en contournant les syndicats", ces syndicats appellent donc les salariés à faire grève et à manifester le jeudi 31 mars "sur tout le territoire".  Il s'agit, dit la déclaration, "d'obtenir le retrait du projet de loi de réforme du code du travail" et "d'obtenir de nouveaux droits, synonymes de progrès social, pour gagner aussi une autre répartition des richesses dans une société solidaire".  En attendant le 31 mars, poursuit le texte, "il convient de réussir" les mobilisations annoncées le 9 mars.

La semaine prochaine va donc voir deux groupes de syndicats tenter de mobiliser les salariés lors de deux journées différentes. Cette division syndicale donnera-t-elle un répit au gouvernement ? Ces mobilisations confirmeront-elles au contraire l'hostilité au projet observée sur internet ? A suivre…

(*) Avis aux lecteurs : notre vidéo ne concerne que la première intersyndicale (CFDT, CFTC, CGC, UNSA, etc.), le temps nous ayant manqué pour pouvoir enregistrer les réactions des responsables syndicaux de la deuxième intersyndicale. 

Julien François
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